Le vieux dicton de ma
grand-mère « mieux vaut prévenir que guérir » étant vrai et idéal, il
serait prétentieux de dire que toutes les blessures peuvent être prévenues.
Bien que ce soit plus facile à faire en athlétisme que d’autres sports, comme
le football, car l’environnement y est beaucoup plus contrôlé. Les mêmes
mouvements sont beaucoup plus répétés et les chances de se faire plaquer au sol
beaucoup moindre. Néanmoins nous savons qu’un mauvais patron moteur va
éventuellement créer des micro-traumas qui vont engendrer de la douleur, la
cessation de l’activité, un long processus de réadaptation, de la colère, de la
tristesse and pas de records personnels pour cette année (pour ne nommer que
certains éléments). En tant qu’entraîneur, le plus gros problème est le manque
de connaissances sur les blessures et c’est très bien comme ça, ce n’est pas
votre travail! Cependant voici quelques trucs pour garder vos athlètes sur la
piste!
Filtrer
vos athlètes
Il
y a plusieurs tests qui prétendent pouvoir prévenir les blessures. Un des plus
populaires et de loin mon préféré est le
Functional Movement Screen (FMS) de Gray Cook, un physiothérapeute
américain. Ce test est plutôt simple et court à exécuter, environ 7-15 minutes
selon votre expérience. Il peut également être fait avec de grosses équipes
(cette année nous l’avons fait sur 53 athlètes en un entraînement) et sensiblement
tout le monde avec des connaissances dans le sport ou l’exercice peut apprendre
comment le faire. Aller faire votre certification et commencer à filtrer vos
athlètes maintenant! Sinon vous pouvez demander à un thérapeute du sport ou un
physiothérapeute de venir au début de chaque saison pour le faire et vous
donner les recommandations.
Un
autre test rapide et facile est le Knee
Tuck Jump Assessment. Ce test consiste à faire le plus grand nombre de
sauts groupés en dix secondes où l’examinateur regarde les différentes
dysfonctions. Plus d’informations peuvent être trouvé sur ce test ici,
Les vieilles techniques de tests comme
la flexibilité des ischio-jambiers, le plus grand nombre de push-ups et de redressements assis sont
plutôt inutiles quand il vient temps de prévenir les blessures pour
l’athlétisme. Courir est un mouvement complexe et on doit savoir si chaque
mouvement de la chaîne est fonctionnel ou non. Si ce ne l’est pas, corrigez-le,
si ce l’est renforcez le. N’oubliez pas que vous ne pourrez pas aller plus vite
ou être plus fort que le maillon le plus faible de la chaîne.
First move well, then move
often – Gray Cook
Combien
de vos athlètes ont des périostites ou des douleurs au genou pendant la saison?
Combien ont essayé des orthèses et une panoplie d’étirements sans résultats? Le
problème n’est peut-être pas aussi superficiel. Avez-vous regardé leur
stabilité du tronc? Avez-vous demandé à un spécialiste de regarder si leur
bassin était bien aligné? La réponse pourrait aussi simple? Et si des mois et
années de douleur pourrait se résoudre juste en regardant à des chaînes de
mouvements plutôt que la région douloureuse? Pour être honnête, les douleurs
chroniques du genou viennent rarement du genou, ce n’est qu’une « victime »
d’un problème qui se passe en-haut ou en bas. Si vous n’avez pas les
connaissances pour regarder tout ça, engagez quelqu’un! C’est un très bon
investissement de voir ses athlètes courir plutôt que de les voir faire des
exercices correctifs la semaine avant le championnat canadien!
Flexibilité
et étirements
Ceci
est sujet délicat et certaines personnes n’aiment pas en entendre parler. Voici
mon opinion quand même, évidemment basé sur de récentes études : les
étirements statiques (tenir une position pour un temps donné) avant une
activité de puissance comme le sprint peuvent réduire la puissance développée.
C’est pourquoi je suggère de faire des étirements dynamiques (mouvements dans
une amplitude complète) avant les activités de puissance.
Ceci
étant dit, certaines personnes ont besoin de faire des étirements statiques
avant les entraînements. Un athlète se remettant d’une blessure ou ayant des
tensions musculaires va bénéficier du relâchement fascial et de l’étirement
avant son activité.
Voici
un exemple de protocole à utiliser :
1. Foam
roller ou rouleau à
pâte sur le muscle ciblé pour 20 à 30 oscillations sur le point de tension
(celui qui vous fait crier quand vous pesez dessus…)
2. Étirements du même muscle pour un
minimum de 30 secondes
3. Éducatifs permettant d’utiliser cette
nouvelle amplitude de mouvement
4. L’entraînement peut commencer
Efficace
n’est-ce pas!?
Construire
une fondation solide pour le futur
Voilà
un concept que déjà plusieurs entraîneurs connaissent et utilisent, mais
comment l’appliquer pour prévenir les blessures. Aux débuts de la saison, les
sprinters font souvent un plus haut volume d’entraînement pour améliorer leur
endurance. Et si on ajoutait une partie importante de cet entraînement en
étirements et exercices de prévention pour s’assurer que tout le monde soit sur
la même page au moment de commencer la saison? Vous pouvez faire votre propre
routine (style yoga) à la fin de chaque entraînement qui étires tous les
muscles et chaînes de muscles. Aussi investissez dans quelques foam roller ou stick (ou rouleau à pâte!) que les athlètes peuvent utiliser aux
entraînements.
Pour
le renforcement, votre filtre de début de saison va vous guider vers les principaux problèmes de vos
athlètes. Vous pouvez faire un programme d’exercices correctifs général pour
tous vos athlètes qui contient un peu de tout ou avoir un programme
individualisé fait en fonction de leurs faiblesses. Un bon moyen de s’assurer
que les athlètes le font, c’est de l’intégrer dans l’échauffement.
Pour
les souliers, je suggère de porter des souliers minimalistes pour les
entraînements de course et en musculation. Tous les athlètes compétitionnent en
spikes qui sont des souliers très
minimalistes. Vous devez vous assurer que vos athlètes sont prêts à absorber
autant de force et surtout que leur patron de course est le même en
l’entraînement qu’en compétition. Ceux-ci vont également augmenter la densité
osseuse et vont réduire les chances d’avoir des fractures de stress. Si vos
athlètes sont habitués de courir avec des souliers cousinés, assurez-vous de
faire une transition progressive vers le minimalisme.
Posture
Une
posture grande et détendue est essentielle en athlétisme. Dire à vos athlètes
de rester grand et relax pendant une course n’est surement pas suffisant ni efficace.
Il faut leur donner de la rétroaction automatique. Enseignez-leur comment faire
un deadlift en gardant un bâton
(hockey ou manche à balais) dans le dos. Celui-ci devrait rester en contact
avec la tête, le milieu du dos (entre les omoplates) et le sacrum pendant tout
le mouvement.
La
corde à danser est également un excellent outil pour la posture. Vous ne pouvez
pas performer si vous êtes voûtés. De plus c’est un excellent exercice pour
introduire la pliométrie et pour les entraînements aussi bien anaérobique qu’en
aérobie. Essayez différentes variantes : une jambe, une jambe en avant une
en arrière, en courant, doubles…
La
posture devrait également être parfaite pendant les entraînements de
musculation. Évitez les machines et concentrez-vous sur les poids libres, les
poulies mais surtout les entraînements avec le poids du corps. Les machines
vont rendre vos muscles stabilisateurs paresseux. Les poids libres utilisés
adéquatement, vont vous permettre d’activer vos muscles stabilisateurs alors
vous n’aurez pas besoin de machine pour la rétroaction de la posture.
Questionnaire médical
Probablement une des parties les plus simples, mais aussi des plus négligées.
Faire remplir un questionnaire médical à vos athlètes en début de saison va
vous sauver des situations d’urgences. Mise en situation : vous voyagez
vers le site de compétition en et une athlète dans l’autobus commence à avoir
de la difficulté à respirer, sa langue est enflée, elle a des rougeurs et
s’évanouit. Vous ne saviez pas qu’elle était allergique aux arachides et un
autre athlète mangeait son sandwich au beurre d’arachide tout à côté.
Il y a tellement de conditions
médicales qui vous sont méconnues et vos athlètes ont probablement l’une
d’elles. Il n’en prend que cinq minutes pour compléter un questionnaire et ça
peut sauver une vie. Si le questionnaire vous revient sans réponse positive, il
n’y a pas à s’inquiéter et vous pourrez dormir tranquille. Sinon parlez-en à
votre athlète et ces parents et dans le doute demandez des clarifications d’un
médecin pour assurer une participation sécuritaire.
Quoi faire en cas de blessure?
Voici pour terminer quelques trucs à suivre en cas de blessure.
Pour n’importe quelle blessure aiguë,
ne vous posez même pas la question : « Chaud ou froid ? »
C’est toujours FROID! La glace permet de diminuer le métabolisme et la douleur,
deux points qui seront bénéfiques pour votre athlète. Après 72 heures, demandez
à un professionnel de la santé les étapes à suivre.
Bandages prophylactiques (taping) : même si ceux-ci sont
moins populaires qu’au football, certaines personnes tendent à adorer les
bandages comme outils de prévention. Cependant soyez prudent : se faire
bander la cheville, par exemple, risque d’atrophier vos muscles, de diminuer
votre proprioception et donc de favoriser les blessures. Pas tout à fait l’effet
voulu! Les bandages devraient être appliqués seulement en phase de retour au
jeu après une blessure et pour une brève période de temps. Particulièrement
lorsque vous travaillez avec des enfants et adolescents qui sont en train de
grandir. La dernière chose que vous voulez faire c’est de créer une asymétrie.
Trouvez un bon thérapeute pour votre
équipe peut être difficile quand vous ne savez où regarder. Demandez quelqu’un
avec de bonnes techniques de thérapie manuelle, qui connait l’athlétisme, qui
se tient au courant des nouvelles recherches, qui est bon en prescriptions
d’exercices (et original) et prend bien soin de vos athlètes. Certains
thérapeutes arrangent des rendez-vous de 60 minutes, mais en réalité passent
seulement que 15-20 minutes avec l’athlète. Le reste du temps votre athlète est
branché sur une machine préprogrammé. Si votre thérapeute n’a pas 500 athlètes
à s’occuper seul, il devrait prendre le temps de traiter, de parler et surtout d’éduquer
vos athlètes.
Est-ce que vos athlètes devraient courir
même quand ils ont mal? Contrairement au traditionnel « No pain, no gain », un de mes
professeurs d’université disait : « No brain, no gain ». La douleur est un signal envoyé à votre
cerveau pour signaler que quelque chose ne va pas. Donc la réponse est non. Si
votre athlète a de la faible douleur après un entraînement, c’est sûrement le
début d’une blessure chronique. Donnez-lui du temps de repos et arrangez des
rendez-vous pour trouver et corriger le problème. Plus rapidement la blessure
est pris en charge, moins longue sera la réadaptation. Si vous ne laissez pas
le temps au corps de récupérer et donc d’avoir quelques jours/semaines de repos
vous pourriez vous retrouverez avec des mois de repos forcé.
Investissez du temps et de l’argent
dans la prévention, ça va valoir la peine. Ne faites pas de changements
drastiques. Commencez par incorporer quelques exercices de prévention comme une
routine de mobilité. Les athlètes aiment leur petite routine, ne les forcez pas
trop vite!
MAD